Le déploiement du télésoin pour les pédicures-podologues instauré par la loi du 24 juillet 2019 relative à l'Organisation et à la transmission du système de santé - OTSS ou Loi BUZYN.

 

Après la télémédecine, le télésoin pour les professionnels de santé non médicaux, va contribuer à façonner une nouvelle organisation des soins à distance au sein d'un territoire de santé numérique.

 

Rappel historique

L’article 78 de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 “Hôpital, Patients, Santé, Territoires”, codifié à l’article L.6316-1 du Code de la santé publique et son décret d’application n°2010-1239 du 19 octobre 2010 codifié aux articles R.6316-1 et suivants du Code de la santé publique, ont reconnu la télémédecine comme une pratique médicale à distance mobilisant les technologies de l’information et de la communication.

La télémédecine est une pratique médicale qui met en rapport grâce aux nouvelles technologies, soit le patient et un ou plusieurs professionnels de santé, parmi lesquels figure nécessairement un professionnel médical et, le cas échéant, d’autres professionnels apportant leurs soins aux patients.

La télémédecine était une réponse aux nombreux défis posés par notre société. L’augmentation du nombre de patients souffrant de maladies chroniques ou de pathologies liées au vieillissement, une démographie des professionnels de santé très mal gérée avec une très inégale répartition sur le territoire national, l’isolement de malades habitant en zones rurales, montagneuses, insulaires, l’exigence de soins adaptés aux résidents en EHPAD, l’indigence des soins donnés aux détenus notamment en psychiatrie, autant de raisons motivant le développement de la télémédecine.

Elle continuerait actuellement d’être une réponse pour les usagers qui peinent à trouver un médecin et pour lutter ainsi contre les déserts médicaux.

 

Apport de la Loi OTSS :

La loi généralise cette pratique aux auxiliaires médicaux, donc au pédicure-podologue, en créant un nouveau dispositif celui du télésoin dont la définition sera donnée ci-dessous.

La loi réunit la télémédecine et le télésoin dans le code de la santé publique sous l’appellation « télésanté ».

Il faut préciser que la télémédecine, le télésoin et la télésanté diffèrent néanmoins en ce sens que la télésanté est l’utilisation de technologies numériques au bénéfice de pratiques médicales et paramédicales.

 

Seuls la télémédecine et le télésoin ont un cadre légal et réglementaire.

Il faut préciser que le télésoin ne se substitue pas aux pratiques actuelles de la pédicurie -podologie.

 

I- Un cadre légal et règlementaire

L’apparition du télésoin dans le code de la santé publique entraîne de facto une modification du code de la sécurité sociale.
 
  1. Le code de la santé publique : L’article L.6316-2 dispose : « Le télésoin est une forme de pratique de soins à distance utilisant les technologies de l'information et de la communication. Il met en rapport un patient avec un ou plusieurs pharmaciens ou auxiliaires médicaux dans l'exercice de leurs compétences prévues au présent code. Les activités de télésoin sont définies par arrêté du ministre chargé de la santé, pris après avis de la Haute Autorité de santé. Cet avis porte notamment sur les conditions de réalisation du télésoin permettant de garantir leur qualité et leur sécurité ainsi que sur les catégories de professionnels y participant. Les conditions de mise en oeuvre des activités de télésoin sont fixées par décret en Conseil d'Etat. »

    Si le cadre légal est d’ores et déjà défini, reste à définir le cadre réglementaire.

  2. Le code de la sécurité sociale : notamment les articles L162-14-1 (modifié par la loi) et L162-15-5 (crée par la loi)
    Article L162-14-1 : I.- La ou les conventions prévues aux articles L. 162-5, L. 162-9, L. 162-12-2, L. 162-12-9, L. 162-14 et L. 322-5-2 sont conclues pour une durée égale au plus à cinq ans. Elles définissent : 1° Les tarifs des honoraires, rémunérations et frais accessoires dus aux professionnels par les assurés sociaux en dehors des cas de dépassement autorisés par la convention pour les médecins et les chirurgiens-dentistes. Le cas échéant, la ou les conventions définissent en particulier le tarif et les modalités de réalisation des actes de télémédecine, définie à l'article L. 6316-1 du code de la santé publique. Les actes de téléconsultation remboursés par l'assurance maladie sont effectués par vidéotransmission. La ou les conventions définissent également, le cas échéant, les tarifs ou les modes de rémunération ainsi que les modalités de réalisation des activités de télésoin définies en application de l'article L. 6316-2 du même code. Les activités de télésoin prises en charge par l'assurance maladie mettent en relation un auxiliaire médical et un patient et sont effectuées par vidéotransmission. Leur prise en charge est subordonnée à la réalisation préalable, en présence du patient, d'un premier soin par un auxiliaire médical de la même profession que celle du professionnel assurant le télésoin ; l'activité du professionnel de santé présent, le cas échéant, auprès du patient n'est pas prise en charge dans le cadre du télésoin ; [….]

Les dispositions en gras sont celles qui ont été rajoutées par la loi et pour information, l’article L162-9 concerne les conventions nationales conclues entre l’UNCAM et une ou plusieurs des organisations syndicales nationales les plus représentatives de chacune de ces professions qui ont pour objet de définir les rapports entre les organismes d'assurance maladie et les chirurgiens-dentistes, les sages-femmes et les auxiliaires médicaux.

En conséquence, les conventions conclues entre l’Union nationale des caisses d’assurance maladie et les professionnels de santé libéraux, devront définir les tarifs ou les modes de rémunération ainsi que les modalités de réalisation des activités de télésoin.

Seules les activités remboursées par l’assurance maladie seront celles qui seront effectuées par vidéotransmission, et qui mettront en relation un auxiliaire médical et un patient.

Toutefois, leur prise en charge est subordonnée à la réalisation préalable, en présence du patient, d’un premier soin effectué par un auxiliaire médical de la même profession que celle du professionnel assurant le télésoin. 

L’accompagnement du patient par un autre professionnel de santé ne sera pas pris en charge.

 

-Article L.162-15-5 : Les conditions de prise en charge des activités de télésoin prévues au 1° du I de l'article L. 162-14-1 sont fixées par décret en Conseil d'Etat.

Encore un cadre réglementaire à définir

 

II- Quelles sont les obligations déontologiques à respecter

La télémédecine, comme tout acte médical, respecte les principes de droit commun de l’exercice médical et du droit des patients. En conséquence, le professionnel de santé qui participe à un acte de télémédecine est soumis aux mêmes obligations légales et déontologiques que dans le cadre de sa « pratique traditionnelle ».

Le télésoin, comme toute pratique de soins doit respecter ces mêmes principes.

Certains aspects méritent d’être précisés :

  • Le pédicure-podologue téléconsultant doit rester libre de décider de la pertinence ou non du recours au télésoin : son indépendance professionnelle doit rester entière.

  • Information claire, loyale et précise du patient et recueil du consentement libre et éclairé : L’information du patient et le recueil de son consentement doivent être réalisés avant la téléconsultation. L’information du patient porte, notamment, sur les modalités pratiques de cet acte à distance qui se fait via les technologies de l’information et de la communication, les alternatives possibles, la possibilité d’être accompagné, la confidentialité des échanges, le traitement informatique des données à caractère personnel, la protection et la sécurité des données de santé, le coût et le reste à charge. Elle peut s’accompagner d’une notice d’information remise au patient.
    Le recueil du consentement libre et éclairé du patient ou, le cas échéant, de son représentant légal est réalisé, et tracé dans le dossier du patient. Le patient doit donner son consentement pour l’acte médical et l’acte à distance via les technologies de l’information et de la communication.

  • Maintien du secret médical : les échanges doivent être sécurisés pour demeurer confidentiels.

 

III-Les règles de responsabilités applicables

Les règles de responsabilité applicables aux professionnels de santé engagés dans un acte de télémédecine sont les mêmes que celles applicables à la pratique traditionnelle de la médecine. Elles restent fondées sur l’application du droit commun de la responsabilité civile professionnelle.

Les médecins pratiquant la télémédecine doivent vérifier qu’ils sont bien assurés à ce titre.

La responsabilité civile d’un professionnel de santé pratiquant un acte de télémédecine ne pourra donc se trouver engagée, pour répondre des conséquences dommageables d’actes de prévention, de diagnostic ou de soins, qu’en cas de faute (article L.1142-1 du CSP).

Ces mêmes règles s’appliqueront aux professionnels de santé engagés dans un acte de télésoin.